Ne
pas confondre « réalité » et « langage »
Afin
que tout soit clair, prenons le temps de distinguer « réalité »
et « langage ». Le langage est un code arbitraire, déterminé
par convention. Les mots sont des symboles qui se rapportent à quelque
chose d’autre qu’eux-mêmes. Par exemple, le mot « bateau »
désigne un objet réel qui n’est pas un mot : il ne faut pas
confondre « l’objet bateau », que l’on pourrait désigner
par un autre mot si on le voulait (comme, par exemple, « saucisse »,
« étoile » ou « varfutmictl »), avec « le
mot bateau » lui-même.
Les
deux principes de la logique s’appliquent autant à la réalité qu’au
langage.
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Le
principe d’identité
Appliqué
au langage, ce principe dicte qu’il faut donner un sens unique et
exclusif à un mot donné. Si l’on désire utiliser ce même mot dans
un autre sens, il faut alors dire explicitement que l’on effectue
ce changement de sens. Sinon, la communication devient impossible. Au
mieux, l’auditeur ne pourra plus comprendre ce que la personne qui
parle raconte, puisque que cette dernière n’utilise plus la convention
initiale à laquelle s’en tient toujours l’auditeur. Au pire, la
personne qui parle ne saura plus elle-même ce qu’elle raconte et
ses propos n’auront plus aucun sens.
Par
exemple, si je vous dit « j’aime naviguer en bateau, mais les
bateaux ont besoin de digérer des insectes pour vivre », vous
ne me comprenez pas. Pour vous, cette phrase n’a aucun sens. L’erreur
que j’ai commise est de changer le sens que j’ai donné au mot « bateau ». Dans
la première proposition, le mot « bateau » désigne l’objet
qu’il est coutume de nommer « bateau » en français. Dans
la deuxième proposition, le même mot « bateau » désigne
un autre objet : l’objet « plante carnivore »… Suite
à cette explication, la deuxième proposition, en soi, cesse d’être
absurde… mais elle n’a plus aucun rapport avec la première ! Ainsi,
mon affirmation, prise dans son ensemble, est dépourvue de toute
signification. (Les objets « plante carnivore » et « bateau »
ont des propriétés entièrement différentes et incompatibles… même
si j’utilise le même mot pour les désigner tous les deux.)
Nous
allons également appliquer ce principe à la réalité. Il signifiera
alors qu’une chose (qu’il s’agisse d’un objet, comme un bateau,
ou d’un processus, comme la loi de la gravitation universelle) est
toujours et exclusivement identique à elle-même. Une chose ne peut
jamais être autre chose qu’elle-même. L’objet « plante carnivore »
(et non pas le mot) ne sera jamais un objet « bateau »,
même si je décidais de le désigner par le mot « bateau ».
La loi de la gravitation universelle ne fera jamais « tomber vers
le haut » une pomme que l’on échappe. (On pourrait objecter
à cette dernière remarque qu’il arrive qu’une feuille de papier
que l’on échappe s’envole. Ici, c’est la présence d’un deuxième
facteur, la résistance de l’air, qui fait plus que compenser la
gravité, qui est responsable de ce mouvement. La feuille reste néanmoins
soumise à la gravité. Allez dans une chambre scellée où l’on ferait
le vide, ou encore sur la Lune où il n’y a pas d’air, et jamais
une feuille de papier que vous y échapperez ne s’envolera.) Ce principe
semble tellement évident qu’il peut paraître non pertinent de se
donner la peine de le formuler explicitement. Cependant, nous voulons
ici être exhaustif et formuler tous les principes sur lesquels se
fondent la réalité et la recherche de connaissances. Si nous omettions
de prendre conscience explicitement de certains principes, ceux-ci
pourraient influencer nos raisonnements sans que nous nous en rendions
compte.
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Le
principe de non-contradiction
Appliqué
au langage, ce principe dicte qu’une affirmation ne peut pas, dans
un même contexte, être simultanément vraie ET fausse. Sans le principe
de non-contradiction, il est impossible de dire quoi que ce soit.
Si, dans un premier temps, la personne qui parle affirme une chose,
puis, dans un deuxième temps et dans un même contexte, nie cette
même chose, alors elle n’a rien dit du tout ! Elle n’est pas d’accord
avec elle-même !
Par
exemple, si je vous dis « j’aime naviguer en bateau, mais
je n’aime pas naviguer en bateau », je ne vous ai absolument
rien dit quant à mon rapport affectif avec la navigation. Mais si
je vous dis « j’aime naviguer en bateau lorsque le temps
est ensoleillé, mais je n’aime pas naviguer en bateau lorsque le
temps est pluvieux », alors là je vous ai véritablement transmis
de l’information. Une même proposition (« j’aime naviguer en
bateau ») peut être simultanément vraie dans un contexte ET
fausse dans un AUTRE contexte, mais pas dans le même.
Nous
allons également appliquer ce principe à la réalité. Il signifiera
alors qu’une chose (qu’il s’agisse d’un objet, comme un bateau,
ou d’un processus, comme la loi de la gravitation universelle) ne
peut pas, dans un même contexte, simultanément exister ET ne pas
exister. Je ne peux pas affirmer que, parce qu’une feuille de papier
que j’échappe s’envole, celle-ci n’est pas soumise à la gravité.
Elle l’est tout autant qu’une pomme que j’échappe. De même, la pomme
que j’échappe est tout autant soumise à la résistance de l’air que
la feuille de papier qui s’envole. Mais la résistance de l’air n’a
pas la même emprise sur une pomme que sur une feuille de papier.
Autre
exemple : le fait que « les plantes carnivores ont besoin
de digérer des insectes pour vivre » est toujours vrai… dans
le contexte habituel où elles vivent (sol acide). Mais si on replantait
ces plantes dans un autre contexte (sol riche en azote et en minéraux),
peut-être que ce fait ne serait plus vrai et que les plantes carnivores
pourraient se passer d’insectes.
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